Éditions GOPE, 12.6 x 18.4 cm, 340 pages, ISBN 979-10-91328-31-9, 18 €

Traduction : Marie Armelle Terrien-Biotteau

vendredi 11 novembre 2016

Il n’a peur de rien et surtout pas de l’inconnu



Le Gweilo, en cantonais, (« étranger de race blanche », on dirait Farang en Thaïlande), c’est un blondinet de 7 ans qui débarque à Hong Kong où son père est nommé, en 1952.

Venu de la grisaille de l’Angleterre, il découvre avec stupéfaction, puis passion les rues qui allaient devenir son grand terrain de jeu et où il serait bientôt connu de tous. Il a l’immense chance d’avoir une mère intelligente qui le laisse vadrouiller après l’école. Il n’a peur de rien et surtout pas de l’inconnu. Ses cheveux blonds le protègent (les toucher porte bonheur et personne ne s’en prive, c’est son laissez-passer), et le livre est le récit très bien écrit, plein d’humour et autobiographique de ses découvertes et ses rencontres qu’on imaginerait bien en bande dessinée : les coolies « aux petits chapeaux en forme de dôme », les oiseaux dans leur cage de bambou accrochés aux fenêtres, les commerçants aux marchandises bizarres, les jonques de pêche...

C’est le Hong Kong très coloré des années 50 et c’est aussi celui de la cruauté de la vie en Orient, de la pauvreté des Chinois qui ont fui les communistes et ont tout perdu, mais c’est parallèlement une colonie anglaise qui procure une vie luxueuse à ses expatriés, dont la mère et l’enfant aiment bien profiter – thé dans les grands hôtels, shopping et country club, et beaucoup de verres de gin-tonic pour le père.

Trois années cela passe vite, il a fallu se préparer à rentrer « chez nous » que ni la mère ni l’enfant ne considéraient plus comme chez eux ; il faut faire les adieux et choisir les cadeaux, et après avoir acheté deux sauterelles porte-bonheur, ils gravissent lentement la passerelle du paquebot, la mère en larmes. Il avait 10 ans, parlait un peu cantonais et très bien le pidgin, un pan de sa vie se refermait.

Heureusement, le livre s’achève par ces mots : « Quatre ans plus tard, exactement comme l’avait prédit ma mère, mon père était fonctionnaire colonial et nous étions de retour. Pour de bon. » Et nous, nous sommes bien contents pour lui !

Martin Booth (1944-2004) a écrit Gweilo peu avant de mourir d’un cancer, en Angleterre, en 2004. Poète, romancier, biographe, éditeur et scénariste, il a plus de 70 ouvrages à son actif, dont certains ont pour cadre l’Asie et la Seconde Guerre mondiale.

M.G.
Gavroche Magazine, N° 264 , octobre 2016